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EN ACTION /

Débat wallon: Les classes populaires doivent-elles payer la transition?

TEXTE et PHOTO David Morelli | TEMPS DE LECTURE: 3,6 MINUTES | 15 FÉVRIER 2023

Le 8 février dernier, la CSC wallonne a invité Paul Magnette (PS) et Jean-Marc Nollet (Écolo) pour une rencontre-débat sur le bien-vivre en Wallonie et la transition juste.

En mai 2022, le congrès de la CSC wallonne a défini les grandes lignes d’un modèle sociétal durable dans lequel il fait bon vivre et qui accompagne les citoyens dans la transition vers une société plus juste et durable. «L’enjeu climatique couplé aux enjeux économiques et sociaux de la transition est la priorité de la CSC. La transformation et le déploiement d’une Wallonie plus verte doit se faire avec les travailleuses et avec les travailleurs. Notre rôle est de faire en sorte que l’on puisse intégrer le débat avec eux.»

À l’heure où tant les inégalités que les émissions de CO2 augmentent, ce débat constitue pour la CSC wallonne une première étape pour obtenir des victoires syndicales concrètes en matière de transition juste. À cette occasion, les nombreux militants présents ont pu questionner le président du parti socialiste, Paul Magnette, et le coprésident d’Écolo, Jean-Marc Nollet, sur les enjeux du coût de la transition et de la juste répartition de l’effort. En d’autres termes, qui devrait ou va payer la transition et comment? Les témoignages de trois militants ont servi de base concrète pour aborder différentes facettes de la transition.

Décarbonation et précarité énergétique

Les conséquences sur l’emploi de la décarbonation des entreprises et les enjeux de la reconversion ont été abordés à travers le témoignage de Jean-Michel, délégué à la cimenterie Holcim. Tant du côté d’Écolo que du PS, on constate que la transition va être destructrice, mais aussi créatrice d’emplois. Il s’agit donc d’anticiper les mutations professionnelles des travailleurs des secteurs impactés, particulièrement à travers la formation. Afin de garantir des emplois de qualité, la concertation avec les syndicats pour mettre sur pied des plans de transition structurants avec le gouvernement wallon et les entreprises a été pointée. Notons que le président du PS envisage la création d’un dispositif de garantie d’emploi qui obligerait l’État à fournir un «vrai» emploi aux personnes n’en trouvant pas après un certain laps de temps.

Isabelle, maman solo sans emploi, a vu ses provisions énergétiques passer de 180 à 922 euros par mois. Son témoignage a crûment posé la question de la précarité énergétique et du frein que constitue le statut de cohabitant pour tenter d’en sortir (voir pp. 28-29). Les deux invités ont pointé les abus de certains fournisseurs d’énergie. Ils adhèrent au principe de la taxation des surprofits et plaident pour une réforme du tarif social. La nécessité de l’individualisation des droits a été évoquée par le représentant écologiste. Le plafonnement des prix de l’énergie en Belgique a constitué un point de désaccord: pour J.-M. Nollet, ce plafonnement est impayable et doit se faire au niveau européen. Le président socialiste plaide pour un plafonnement pour un volume de base. Ce dernier évoque également la reprise de l’énergie par les pouvoirs publics sous la forme d’une société mixte avec Engie.

Manger ou faire le plein?

Enfin, Katty, militante des titres services, a exposé les difficultés financières des travailleuses du secteur et le coût de la mobilité qui leur est imposée. Reconnaissant les limites des transports en commun pour certains types d’emploi, la mise à disposition de véhicules par l’entreprise a été évoquée par les deux parties. Plus largement, le maintien de l’indexation automatique des salaires et une réforme de la fiscalité au profit des bas revenus font partie des leviers préconisés par les deux partis.

Qui va payer la transition?

Une nouvelle fois, les propositions convergent fortement: il y a de l’argent pour financer la transition, entre autres en matière d’infrastructure publiques, et il s’agit d’aller le chercher là où il est via la lutte contre la fraude fiscale, la globalisation des revenus et la taxation du capital (au-dessus de 2 millions d’euros (PS)), ou en revoyant le rôle que doit jouer la Banque centrale européenne et les banques nationales en matière d’investissements (Écolo). Jean-Marc Nollet pointe par ailleurs que le coût de l’inaction à moyen et long termes sera supérieur (et difficilement tenable pour les finances publiques) à celui d’actions en faveur de la transition. De son côté, Paul Magnette plaide pour la mise à disposition, hors de toute logique lucrative, de biens publics universels en matière de logement, de soins, d’alimentation…


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«On est prêt à discuter avec vous alors que vous allez commencer à élaborer vos programmes pour les prochaines élections ». Marc Becker

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Mains tendues

«Je suppose que tout cela va se retrouver dans vos programmes de parti et dans l’accord de gouvernement», déclarait, avec un zeste d’ironie, Marc Becker a l’issue du débat, constatant que, malgré «des mains tendues de votre part, sur le terrain politique, cela reste difficile de faire ce débat».

Et le secrétaire national en charge des affaires wallonnes de rappeler aux intervenants l’absence de concertation avec les syndicats sur certains dossiers: «ll y a plus de 20 ans que les organisations syndicales demandent à être consultées sur l’attribution des quotas de C02» et le manque de prise en considération de leurs analyses: «Nous avons tout de suite dit que le modèle proposé concernant le budget mobilité dans les titres-services ne fonctionnerait pas. Si nous avions été entendus dès le départ, les travailleuses du secteur auraient aujourd’hui leur budget mobilité.»

Et Marc Becker de tendre également la main: «On est prêt à discuter avec vous alors que vous allez commencer à élaborer vos programmes pour les prochaines élections ».

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