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EN DÉBAT /

Les flexi-jobs détruisent l'emploi fixe

TEXTE Donatienne Coppieters I PHOTO Shutterstock | Durée de lecture: 4 MINUTES | 18 JANVIER 2023

Des prix de l’énergie qui s’envolent et une inflation qui bat des records: un très grand nombre de personnes se tournent vers les flexi-jobs pour compléter leur revenu. À partir du 1er janvier 2023, le gouverne-ment devrait en principe étendre le nombre de secteurs dans lesquels les flexi-jobs sont autorisés. Outre l’horeca et le commerce de détail, des possibilités vont être offertes jusqu’en décembre 2024 dans les secteurs du sport, de la culture (alors que le gouvernement a prétendu améliorer le mal nommé «statut d’artiste»), l’événementiel, les soins de santé. Non seulement, ces flexi-jobs ne contribuent pas à financer la sécurité sociale, mais ils sont également une menace pour l’emploi fixe. La grande manifestation du secteur non marchand qui se déroulera le 31 janvier à Bruxelles ne manquera pas de le dénoncer.

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«Les flexi-jobs sont une partie du problème, pas la solution»

Vinciane Convens, secrétaire nationale pour la culture à la CNE

À partir du 1er janvier 2023, il sera possible d’exercer un flexi-job dans le secteur de la culture. «Les artistes et les techniciens recourent déjà énormément à des contrats de courte durée, explique Vinciane Convens. Dans un secteur qui ploie déjà sous les contrats précaires, le système des flexi-jobs va encore accroître l’instabilité de l’emploi.»

Il y a trois gros problèmes avec les flexi-jobs. Premièrement, il s’agit la plupart du temps de contrats d’appel qui permettent à l’employeur de vous appeler ou de vous décommander à sa guise. Aucune prestation minimum n’est convenue et, dans le pire des cas, l’employeur vous renvoie chez vous sans vous payer. Il est possible de refuser une prestation mais, si les refus se répètent, l’employeur finira par ne plus faire appel à vous.

Par ailleurs, le salaire minimum sectoriel – qui est déjà faible – n’est même pas garanti. Il se peut dès lors que deux travailleurs soient amenés à travailler ensemble et que leur salaire présente un écart très important. Les compétences, l’expérience ou l’engagement ne comptent plus. Nous trouvons que ce n’est pas correct. Regardez ce qui se passe dans l’horeca: certains restaurateurs mettent un travailleur fixe à la porte pour ensuite faire leur choix parmi un groupe de cinq flexi-jobistes. Les employeurs ont ainsi moins de charges et une plus grande flexibilité, mais on peut dire adieu aux emplois stables. Les interlocuteurs sociaux devraient pouvoir décider eux-mêmes s’ils souhaitent que le système soit étendu à notre secteur et à quelles conditions mais, si vous voulez notre avis, les flexi-jobs sont un non-sens.

Ce dont les travailleurs ont besoin, ce sont des emplois stables et des contrats plus longs, pas d’un démantèlement encore accentué des conditions de travail. Ce dont le secteur a besoin, ce sont des travailleurs réguliers et qualifiés.»

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«Il y a deux ans, on applaudissait le secteur des soins de santé. En guise de remerciement, on a introduit les flexi-jobs»

Yves Hellendorff, secrétaire national pour les soins de santé à la CNE

Dans le secteur des soins de santé aussi, des flexi-jobistes peuvent être engagés depuis le 1er janvier 2023. Bien que les fonctions de soin soient exclues du système, des collaborateurs logistiques ou autres pourront être engagés dans le cadre d’un flexi-job dans les hôpitaux et les maisons de repos, par exemple. «Quand on voit l’importance de travailler en équipe multidisciplinaire et l’importance de la délégation d’activités pour soutenir le personnel soignant en pénurie, les flexi-jobs sont une erreur fondamentale», estime Yves Hellendorff.

C'est purement une mesure d’économie. Il y a deux ans, pendant le Covid-19, on applaudissait les personnels des soins de santé. On reconnaissait l’importance du professionnalisme pour tous les métiers du secteur. En guise de remerciement, on nous donne maintenant des flexi-jobs. En réalité, ces emplois ne résorbent pas la pénurie de main-d’œuvre. Les fonctions de soin sont exclues des flexi-jobs – encore heureux – mais des fonctions logistiques qui impliquent également des contacts avec les patients peuvent, quant à elles, être occupées par des flexi-jobistes. Des études démontrent pourtant par exemple que les patients âgés ont besoin de voir les mêmes visages, ce qui ne sera pas le cas avec des flexi-jobistes.

Pour couronner le tout, la rémunération des flexi-jobistes est nettement inférieure à la rémunération des collaborateurs engagés avec un contrat classique. Prenons l’exemple d’un collaborateur logistique dans un hôpital: avec cinq ans d’ancienneté, le salaire d’un flexi-jobiste est inférieur de 32 % au salaire d’un collaborateur fixe. Le flexi-jobiste ne perçoit pas non plus de supplément pour le travail en soirée, le week-end ou la nuit et pour les heures supplémentaires. Pour l’employeur, il est donc financièrement beaucoup plus intéressant d’engager un flexi-jobiste.

Enfin, de nombreuses personnes occupées à temps partiel dans le secteur des soins demandent de pouvoir prester plus d’heures. Une enquête montre qu’elles sont entre 23.800 et 30.700 mais que ces heures ne leur sont pas accordées. En introduisant les flexi-jobs, ces travailleurs à temps partiel sont condamnés à prester peu d’heures ou à accepter un statut précaire pour pouvoir travailler avec, à la clé, une détérioration des conditions salariales et de travail.

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Si vous constatez, dans votre entreprise ou votre secteur, que les flexi-jobs prennent de l’ampleur par rapport aux emplois permanents, faites-le nous savoir.

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