FACE À FACE /
Les vélos-cargos: une alternative pour les livraisons urbaines
TEXTE Avril Forrest | PHOTO Dioxyde de Gambettes | TEMPS DE LECTURE: 4 MINUTES | 23 SEPTEMBRE 2023
Le vélo-cargo a le vent en poupe dans le secteur de la livraison. Un nouveau métier que l’on a découvert grâce à Baptistine, pédaleuse à Bruxelles pour la coopérative Dioxyde de Gambettes.
Dioxyde de Gambettes ou GO2 pour les intimes: un nom évocateur, qui séduit aussi pour la façon dont cette coopérative se démarque en matière de conditions de travail. Les salariés sont engagés en CDI ou CDD sous un régime de 24h par semaine en moyenne et les intérimaires signent leurs contrats chaque semaine, tout en respec-tant la même commission paritaire que les salariés. Au total, GO2 regroupe aujourd’hui plus de 100 coopérateurs, 8 salariés et un «flexipool» composé d’intérimaires et d’étudiants.
Depuis 2020, GO2 fait partie du projet Circularium qui a pour vocation de reconfigurer un ancien complexe automobile situé à Anderlecht en un lieu innovant et attractif pour des initiatives d’économie circulaire.
On la surnomme «le GPS»
C’est là que nous a donné rendez-vous Baptistine. GO2 n’est pas difficile à trouver. Des remorques, des vélos, des outils, des colis, un ou deux casques qui trainent et encore des vélos. Baptistine nous accueille et nous fait la visite des lieux. Elle nous parle mécanique, technique, gestion et conditions de travail.
La coopérative dispose de 8 vélos dont 6 avec assistance électrique. Un chargement complet de la batterie permet d’assurer un shift de livraison, soit une distance de 30 à 60 km.
Selon Baptistine, ce métier offre des conditions de travail relativement agréables en comparaison avec les modes de livraisons conventionnels. Avec un vélo cargo, on peut se déplacer plus facilement dans les rues encombrées et accéder à des passages inaccessibles aux véhicules motorisés. Pour les pédaleurs, la pression est donc moindre que pour les livreurs en camionnette. Autre avantage: les contacts sociaux qui sont très présents dans ce métier. Régulièrement, les pédaleurs prennent le temps de discuter avec les clients avant de remonter en selle. C’est aussi ce qui se dégage de la coopérative en tant que telle, sa petite taille et son emplacement idéal permettent d’être constamment au contact d’autres personnes, de profiter de quelques rayons de soleil dans la cour intérieure ou d’admirer des créations artistiques disposées à la vue de tous. En bref, un cadre de travail facilitant la réduction du stress.
Un autre point important qui ressort également est celui de la sécurité des travailleurs et des travailleuses. Généralement, les livreurs en camionnette, qui sont payés au colis, travaillent avec moins de sécurité que des salariés payés à l’heure.
D’autres aspects positifs sont également soulignés par Baptistine: les livreurs à vélo sont souvent perçus comme des acteurs respectueux de l’environnement qui contribuent positivement à la vie urbaine, et pour beaucoup, c’est une source de fierté et de motivation supplémentaire. Ensuite, les pédaleurs profitent des bienfaits d’une activité physique régulière tout en gagnant leur vie. «Et quand tu pédales, tu vois toute la ville, toutes ses rues et tu finis par en connaître les moindres recoins», souligne Baptistine, pédaleuse assidue que ses amis surnomment “le GPS”».
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«Les livreurs à vélo sont souvent perçus comme des acteurs respectueux de l’environnement qui contribuent positivement à la vie urbaine.»
Baptistine
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Des plus et des moins…
Il y a aussi des côtés moins roses, bien sûr. L’inconvénient d’une petite structure, tel que Dioxyde de Gambettes, c’est la disponibilité à la fois des pédaleurs et du volume. En effet, contrairement à une entreprise de livraison classique, le nombre de colis livrés par jour est drastiquement inférieur puisqu’il est environ d’une centaine. Ceci justifie également le prix des livraisons généralement légèrement plus élevé lorsqu’elles sont effectuées à vélo-cargo.
Vu la météo capricieuse de notre joli pays, la réalité du travail, c’est aussi parfois une cape de pluie, des doigts glacés et un ciel souvent gris. Comme partout, il y a des plus et des moins…
En écoutant Baptistine nous raconter son quotidien, il apparait aussi clairement qu’être pédaleuse, ce n’est pas de tout repos. En moyenne, les vélos-cargos peuvent transporter jusqu’à 180 kg. Dans la réalité, le poids des colis se rapproche plus des 60 kg. Mais à ces 60 kilos transportés dans le cargo, 100 kg sont souvent ajoutés dans une remorque, faisant ainsi monter le shift d’un pédaleur jusqu’à 150 kg.
On peut l’imaginer: la personne en charge de la livraison doit avoir une bonne condition physique… Sans oublier que piloter un cargo et une remorque, ça ne doit pas être évident. Les rues ne sont pas forcément adaptées à ce genre de véhicule et il est nécessaire de pren-dre le temps de s’habituer à la conduite de tels engins: «environ trois mois pour se sentir réellement à l’aise», nous dit Madame GPS.
Des clients convaincus?
Du point de vue des clients, quels arguments plaident en faveur des vélos-cargos?
Premièrement, ils permettent un accès à des zones piétonnes et des espaces restreints. Ce qui nous donne l’avantage numéro 2:
la réduction des délais de livraison et la satisfaction des clients. Les vélos-cargos sont particulièrement adaptés pour les
livraisons de petits volumes et de
marchandises légères, ce qui permet aux entreprises de gérer plus efficacement leurs stocks en effectuant des livraisons plus fréquentes, réduisant ainsi les coûts de stockage.
Enfin, opter pour des livraisons à vélo-cargo peut améliorer l’image de marque des entreprises en les associant à une approche éco-responsable et durable. «Les clients apprécient souvent les entreprises qui prennent des initiatives pour réduire leur impact environnemental», souligne Baptistine.
Du point de vue de la société de livraison, l’argument économique est aussi imparable: les vélos-cargos sont moins chers à acquérir, à entretenir et à réparer que les véhicules motorisés. De plus, ils ne nécessitent pas de carburant (hors électricité) et leur taille inférieure à celle des camionnettes facilite le stationnement, évitant ainsi les frais de stationnement élevés dans certaines villes. À noter aussi - et ce n’est pas négligeable - que les vélos-cargos ont tendance à éviter les contraventions éventuelles pour stationnement illégal ou dépassement des limites de vitesse…
À son échelle et de manière socialement responsable, Dioxyde de gambettes montre la voie: en remplaçant les camionnettes par des vélos-cargos pour les livraisons intra-urbaines, on peut réduire considérablement l’empreinte carbone du secteur de la livraison, tout en diminuant la congestion routière, la pollution sonore et de l’air. Tout bénéfice pour la planète et les habitants...
En Région de Bruxelles Capitale,
entre 16.000 camions et 30.000 camionnettes entrent chaque jour du lundi au vendredi,