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TROIS QUESTIONS À /

Trois questions à Lorenzo

/Lorenzo Marredda

Lorenzo Marredda, secrétaire exécutif à la CSC-Transcom, au sujet de la proposition de Directive de la Commission européenne visant à ‘améliorer les conditions de travail dans le cadre du travail via une plateforme numérique’.

Quels sont les problèmes rencontrés dans le cadre du travail via une plateforme numérique, comme Deliveroo et Uber?

Lorenzo — Deliveroo et Uber ont fait le choix de ne pas travailler avec des collaborateurs salariés. Les livreurs sont soit indépendants soit sous le régime de « l’économie collaborative ». Ce sont les travailleurs qui prennent les risques tant physiques car c’est un travail dangereux qu’économiques car ces plateformes n’interviennent en rien pour le matériel dont les travailleurs ont besoin pour exercer leur activité. 

Uber et Deliveroo veulent développer une nouvelle forme de travail dans laquelle l’hyperflexibilité est le maître-mot. La contrepartie que l’on pourrait attendre est une liberté totale des travailleurs pour s’organiser telle que la fixation du prix du service, des horaires, du travail, … Ce n’est pas le cas car ces plateformes imposent aux
travailleurs des contraintes proches de celles du salariat. 

De plus, ces travailleurs indépendants n’ont pas droit à une protection sociale telle que nous pouvons la connaître en tant que salarié. Les personnes travaillant sous le régime de l’économie collaborative n’ont droit à rien puisque le système ne leur permet pas de cotiser pour ouvrir des droits à la sécurité sociale.

En quoi est-ce que la Directive de la CE aide à lutter contre ce travail précaire?

Lorenzo — Cette directive vise à améliorer les conditions de travail des personnes travaillant avec une plateforme numérique.

Elle est encore sous forme de proposition. Elle doit être débattue au Parlement européen puis examinée par le Conseil. Quand elle sera adoptée, les Etats membres auront deux ans pour la retranscrire dans leur propre législation. C’est donc une avancée importante mais le processus législatif n’est pas encore terminé.

Elle prévoit un cadre juridique de la relation de travail. Elle prévoit également qu’un travailleur de plateforme soit reconnu d’office comme salarié, sauf si la plateforme ou le travailleur prouve qu’il est indépendant. Cela change fondamentalement la situation actuelle où le travailleur doit démontrer qu’il est salarié même s’il travaille dans les conditions d’un salarié.

Deux autres progrès permettront une meilleure compréhension des algorithmes qui dirigent les travailleurs et une meilleure traçabilité des données, notamment financières, que traitent ces entreprises.

Que font United Freelancers et la CSC-Transcom dans le cadre de cette problématique ?

Lorenzo — United Freelancers est un service de la CSC créé et porté par plusieurs centrales dont la CSC-Transcom. Avec UF, Transcom s’occupe des travailleurs de plateforme et d’indépendants qui dépendent principalement d’un ou deux donneurs d’ordres ainsi que de travailleurs étant sous le régime de l’économie collaborative.

Nous travaillons avec des collectifs de travailleurs comme le Collectif des Travailleurs de Taxi à Bruxelles. Nous organisons des actions, nous menons des actions en justice, nous interpellons des décideurs politiques. La logique sous-jacente à toutes ces actions est que, quel que soit son statut, un travailleur reste un travailleur. Il est nécessaire que chacun soit défendu correctement, de manière individuelle ou collective, afin que les entreprises ne puissent plus mettre en concurrence les travailleurs sous statuts différents. Il faut éviter que notre système soit détricoté par des multinationales comme Uber et Deliveroo. Elles n’attendent qu’une chose : la division afin de pouvoir imposer leur modèle.

Si on laisse faire, demain, n’importe qui pourrait devenir un travailleur de plateforme, quel que soit son statut actuel. Le télétravail, tel qu’il est lors de la pandémie actuelle, nous donne un aperçu de ce que pourrait devenir très rapidement le monde du travail si nous ne prenons pas garde. //

A.-C. M.-L. // HIVER 2022 // TEMPS DE LECTURE: 1 MINUTE