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FACE À FACE /

«Il faut des mesures pour équilibrer les vies professionnelle et privée»

INTERVIEW Donatienne Coppieters | PHOTO Aude Vanlathem | 21 FÉVRIER 2024 | TEMPS DE LECTURE: 5 minutes

Avec sa campagne «Super Maria jongle entre vie pro et vie perso. Et vous, trouvez-vous l’équilibre?», la CSC reprend la lutte active pour l’égalité entre femmes et hommes. Cette année, les Femmes CSC et les ACV Gender, qui portent la campagne, ont décidé de travailler les revendications qui permettraient de mieux équilibrer la vie professionnelle et la vie privée. Gaëlle Demez, responsable des Femmes CSC, nous en explique les différents aspects.

En quoi l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée concerne-t-il plus les femmes?

Actuellement, ce sont toujours les femmes qui assurent le plus le soin aux autres membres de la famille: les enfants, les personnes âgées, les personnes handicapées. Par conséquence, ce sont aussi les femmes en général qui sacrifient leur carrière, leur travail ou leur temps de travail pour s’occuper de leurs proches, et qui sont du coup pénalisées, notamment financièrement.

Quel est l’enjeu syndical des tâches domestiques?

Les tâches domestiques doivent être faites et elles le sont majoritairement par les femmes, quand elles rentrent du travail. Si ces tâches et le soin aux personnes ne sont pas réparties au sein des familles, les femmes en arrivent à se fatiguer et à réduire leur temps de travail. L’homme va continuer à travailler en ne rémunérant pas sa femme: il y a donc une double perte qui est rarement prise en compte en cas de séparation. Bon nombre de femmes se retrouvent alors avec des revenus très bas et dans une grande précarité. Cela montre que la sphère privée est aussi politique.


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«Quand il y a une meilleure mixité dans les professions, les décisions et solutions sont meilleures pour les femmes et tout le monde en bénéficie.»

Gaëlle Demez

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La CSC veut un congé de naissance obligatoire et allongé pour les papas et coparents. En quoi ce congé peut-il améliorer l’équilibre des femmes?

Une intéressante étude de 2020 (1) mon-tre que quand les papas ont pris leur congé de paternité de 10 jours, l’écart salarial diminue de moitié, telle une recette miracle. De plus, les congés de maladie des mères diminuent pendant les huit premières années de l’enfant et les mamans retournent plus vite au travail, alors qu’un cinquième des femmes ne retourne pas au travail après leur premier enfant. Si le papa prend son congé de naissance, ce chiffre diminue. Maintenant qu’on est à 20 jours de congés de naissance, la situation des femmes devrait encore s’améliorer!

L’avantage pour les papas, c’est qu’ils développent une expertise de leur enfant et se sentent plus concernés, ce qui leur permet de prendre leur part et permet aux mamans d’avoir des temps de repos réels. C’est du bonus pour tout le monde et pour la sécurité sociale aussi puisque les mamans sont moins malades par après.

L’étude montre aussi que si un papa prend un congé de paternité pour le deuxième enfant et pas pour le premier, cela a moins d’impact positif pour les femmes car les mauvaises habitudes sont prises. Après la naissance du premier enfant, le père ou le coparent doit absolument être là pour mettre en place de bons automatismes et contribuer à la vie du foyer en général.

Il s’agit donc d’améliorer la relation entre parents et enfants, une revendication que les Femmes CSC portent avec force. Cela a des impacts concrets et ce sont des revendications qui profitent aussi aux hommes et qu’ils peuvent porter avec les femmes.

La CSC veut aussi 25 jours de congés payés pour chaque travailleuse et travailleur…

Le nombre de congés légaux est actuellement de 20 jours et ce sont sans doute davantage les femmes qui sont concernées par ce minimum. Nous revendiquons cinq jours de congés en plus, à pouvoir prendre librement, quand cela arrange les travailleuses et les travailleurs, pas quand cela arrange l’entreprise.

Le rapport de force diffère dans les entreprises et généralement, les secteurs plus féminins sont ceux où on négocie le moins d’avantages extra-légaux et de conventions collectives car ils sont moins structurés syndicalement. Il y a donc peu de congés extra-légaux et de RTT qui permettent de travailler plus en nombre d’heures par semaine et de récupérer en jours de congés. Cela montre l’importance d’avoir une représentation syndicale forte pour assurer un bon rapport de force dans les entreprises et pouvoir négocier des avantages.

Mais le fait de demander plus de congés légaux permet de passer par la loi et pas par des négociations collectives. On s’adresse aux politiques et pas à l’entreprise. Les 25 jours équivalent à une réduction du temps de travail sans perte de salaire, ce qui est important pour les femmes.

Les Femmes CSC veulent que les crédit-temps, congés thématiques et interruptions de carrière soient renforcés et accessibles sans perte financière avec une assimilation des droits sociaux. Comment persuader le gouvernement de faire marche arrière par rapport à des droits qui existaient?

Les patrons veulent moins de congés thématiques avec des indemnités plus larges. Ils veulent un système plus simple. Nous demandons de réactiver le crédit-temps sans motif pendant un an. Ce droit de décrocher pendant un an pourrait être pris à n’importe quel moment de la carrière en fonction des besoins de la personne et cela simplifierait et uniformiserait les conditions d’accès.

Il faut regarder l’enveloppe de la sécurité sociale. Quand ils tombent en maladie, les gens tombent sur l’Inami. Si on permet aux gens de souffler plus, de prendre des congés de parentalité pour un meilleur équilibre, ils tomberont moins malades, et ce sera tout profit pour l’Inami et pour la société.

La CSC demande aussi un renforcement des services publics. En quoi cela concerne-t-il l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée?

Les femmes consomment plus de services publics. Les services publics contribuent à leur autonomie. Par exemple, des transports en commun à l’heure, sécurisés, fiables permettent aux enfants d’être autonomes dans leurs déplacements. Si les enfants bénéficient de repas chauds de qualité dans les écoles, cela permet aux parents de ne pas devoir faire les courses et préparer un repas en rentrant du boulot. Cela dégage du temps, en plus de réduire les inégalités entre les enfants.

À Hannut par exemple, il y a des navettes publiques qui transportent les enfants des écoles à l’académie et aux activités sportives. Cela est très utile parce que goupiller tous les trajets des enfants peut être une torture psychologique pour les femmes. Des navettes publiques pourraient être organisées pour emmener les personnes âgées à l’hôpital, à leurs rendez-vous médicaux, à des activités extérieures... S’il y a un manque de crèches et de places d’accueil pour les enfants, ce sont le plus souvent les femmes qui en pâtissent.

Une meilleure organisation de la société soutenue par des services publics qui répondent à leurs besoins permettrait aux femmes de travailler de manière plus détendue et réduirait leur charge mentale. Il s’agit d’organiser des services collectifs pour plus d’autonomie pour chacune et chacun.

(1) Coût de l’enfant pour la carrière des femmes et comment le congé paternité peut aider: https://dulbea.ulb.be/files/d1070b846ef1f6e4b0abe5672ba0428e.pdf

/Le 8 mars en actions

• Le 8 mars, participez avec les Femmes CSC à la grève des femmes, aux actions et à la grande manifestation à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes!
• Utilisez le dépliant et l’affiche pour la promotion du 8 mars (www.lacsc.be/8-mars).
• Lisez le dossier pédagogique (www.lacsc.be/8-mars) qui détaille les sept revendications des Femmes CSC:
1. Des papas plus présents .
2. Une place en crèche pour chaque enfant.
3. 25 jours de congés payés.
4. Une vraie répartition des tâches domestiques et familiales.
5. Du temps pour souffle .
6. Lutter contre les temps partiels non choisis.
7. Des services publics renforcés, accessibles et de qualité!

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