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EN DÉBAT /

Les flexi-jobs, une solution indispensable pour le marché de l’emploi?

TEXTE Bram Van Vaerenbergh / PHOTO Belpress / 16 AVRIL 2025 / TEMPS DE LECTURE: 4 MINUTES

Alors que le gouvernement précédent étendait la réglementation relative aux flexi-jobs de façon progressive, secteur par secteur, le gouvernement De Wever entend donner carte blanche aux flexi-jobs: le plafond de revenus exonérés d’impôt pour ce type de régime passe de 12.000 à 18.000 euros par an. Par ailleurs, le principe est inversé: désormais, les flexi-jobs sont autorisés dans tous les secteurs, sauf si la commission paritaire a convenu d’une clause d’opt-out ou s’il s’agit d’une profession protégée. L’interdiction qui empêchait les travailleurs à temps plein d’exercer un flexi-job dans une entreprise liée à leur employeur habituel est également supprimée. Pour l’organisation patronale Unizo, les flexi-jobs ne représentent pas une menace, mais une solution indispensable pour le marché de l’emploi. Cette vision fait-elle réellement l’unanimité?

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Maarten Gerard,
responsable du service d’études de la CSC

«Nous déplaçons l’emploi, au détriment de la société.»

«Initialement, les flexi-jobs étaient spécifiquement destinés au secteur de l’horeca, mais aujourd’hui, ils se généralisent. Les emplois à temps plein sont remplacés par des contrats à temps partiel, combinés à des flexi-jobs. Pour certains travailleurs qui cherchent à augmenter leurs revenus, cela peut sembler logique, mais ce choix a un coût pour la société qui perçoit moins d’impôts. Où est la logique? Les flexi-jobs sont autorisés et encouragés quasiment sans restriction, ce qui augmente le risque de les voir supplanter l’emploi régulier.»

Ce phénomène présente également des risques pour les travailleurs comme l’explique Maarten: «Les flexi-jobistes se constituent des droits sociaux, mais ceux-ci ne sont pas complètement identiques à ceux des travailleurs ordinaires. Et leur travail n’est soumis ni à l’impôt, ni aux cotisations sociales personnelles. Cela représente donc un avantage financier, tant pour l’employeur que pour le flexi-jobiste. En réalité, un contrat flexi-job n’est rien d’autre qu’un contrat d’appel. Un flexi-jobiste peut très bien se retrouver du jour au lendemain sans emploi ni avantage.»

«Avec ce système, le gouvernement saborde le marché du travail dans son ensemble.
Il est absurde qu’il soit fiscalement plus avantageux de travailler à 4/5ème temps, en cumulant un flexi-job, que de travailler à temps plein. En travaillant à temps partiel, un travailleur se retrouve souvent dans une tranche d’imposition inférieure, alors que les revenus d’un flexi-job sont à peine taxés. Cela nuit à l’emploi à temps plein et est néfaste pour l’État. En outre, ce phénomène incite les travailleurs à délaisser des emplois comme dans les soins ou l’enseignement où les besoins sont criants. Ils occupent des emplois ailleurs et privent ainsi d’autres personnes, souvent moins qualifiées, d’opportunités. Résultat: nous y perdons trois fois.»

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Sem Vandekerckhove,
chercheur senior, HIVA-KU Leuven

«L’employeur est celui qui économise le plus!»

«Un revenu d’appoint qui offre de la diversité dans les missions, sans cotisations sociales ni impôts sur le revenu, voilà qui peut sembler une excellente nouvelle pour beaucoup. De plus, ceux qui réduisent leurs prestations pour un flexi-job restent dans les tranches d’imposition inférieures pour une plus grande partie de leur revenu. Mais alors, où est le problème ?», s’interroge Sem Vandekerckhove.

«Premièrement, l’employeur est celui qui économise le plus, même s’il reste redevable d’une cotisation patronale de 28%. En effet, le coût salarial total diminue. Ce gain peut se traduire par un salaire net supérieur au barème, mais il faut le négocier individuellement.

Deuxièmement, le salaire brut d’un flexi-job est inférieur et, bien qu’il soit pris en compte pour la pension par exemple, tant que l’on reste en dessous du plafond social, cette pension brute sera également moins élevée. Par ailleurs, cette pension plus faible ne sera pas exonérée de charges.
Troisièmement, il n’y a aucune garantie de travail: celui qui renonce à des heures régulières afin d’optimiser sa situation fiscale n’est pas certain de pouvoir compenser les heures perdues, car il n’y a pas de contrat de travail, seulement un accord-cadre. Ceux qui acceptent un flexi-job pour joindre les deux bouts peuvent être contraints d’accepter des appels et de travailler plus souvent et plus longtemps que ce qui souhaitable ou même sain.»

«Il faut également émettre des réserves d’ordre social et économique à propos de ce système. D’une part, on peut y voir une forme de régularisation de petits boulots informels qui existaient déjà dans certains secteurs où la demande fluctue beaucoup, comme l’horeca, les parcs d’attraction, les boulangeries de quartier, etc. D’autre part, cette flexibilité ne justifie pas que ces emplois soient fiscalement et parafiscalement plus avantageux que les emplois réguliers et les heures supplémentaires correctement rémunérées. On évince ainsi des travailleurs qui pourraient réellement bénéficier des revenus primaires générés par des emplois plus accessibles. En termes de productivité, nous n’y gagnons rien non plus si des travailleurs hautement qualifiés réduisent leurs prestations dans des emplois de qualité pour multiplier les flexi-jobs.»

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