ÉLECTIONS SOCIALES /
Nous ne demandons pas la lune, seulement la justice!
TEXTE Geneviève Laforêt | PHOTO Aude Vanlathem | 17 JANVIER 2024 | TEMPS DE LECTURE: 3 MINUTES
Lors des élections sociales de 2020, pour la première fois, une représentation syndicale était instaurée dans cette société de titres-services bruxelloise, comptant une centaine d’aide-ménagères. Après plusieurs appels à candidatures lancés par la CSC, Elena s’est finalement décidée à s’engager pour changer les choses dans l’entreprise. Seule candidate, elle fût élue d’office sans que l’on puisse mettre en place les organes de concertation. Cela ne l’a pas empêchée d’exercer son mandat de déléguée syndicale et d’obtenir de substantielles avancées pour ses collègues de travail. Aujourd’hui, malgré qu’elle ait quitté l’entreprise, Elena reste soucieuse de la poursuite, par ses anciennes collègues, du travail syndical engrangé. Nous l’avons rencontrée avec une autre déléguée, Maria, ainsi que leur permanente, Marina Künzi.
Un contexte difficile pour le travail syndical
En 2020, les conditions de travail dans l’entreprise sont difficiles, que ce soit à la centrale de repassage ou chez les clients. À la centrale, outre les conditions physiques (travail à la pièce, brûlures de vapeur…), le climat est aussi délétère. Chez les clients, les tâches ne sont pas bien définies et sont parfois ingrates, le matériel de travail n’est pas toujours ergonomique et les produits utilisés peuvent être malsains, voire toxiques. Aucun contrôle des lieux de travail n’est exercé par le conseiller en prévention. Malgré le fait que le secteur soit subsidié à 70%, il ne fait partie ni du non-marchand, ni de l’économie sociale.. Les objectifs commerciaux et de rentabilité financière dominent.
Comment établir des liens avec le personnel dispersé sur différents lieux de travail?
L’isolement est le lot quotidien des aide-ménagères… Non seulement elles sont dispersées et ne se rencontrent quasi jamais, mais lorsqu’elles viennent au bureau pour rendre leurs chèques, nous n’avons pas la possibilité d’échanger avec elles, même si nous travaillons à la centrale. De plus, le personnel, parfois très précarisé, vit dans la crainte de perdre son emploi. Nous avons donc créé un groupe WhatsApp syndical nous permettant de communiquer avec les affiliées (moyennant leur accord), de répondre à leurs questions individuelles, de recueillir leurs plaintes et les informer. Progressivement, après la crise sanitaire, nous sommes parvenues à tisser des liens entre collègues, à organiser des assemblées, distribuer des tracts, mais aussi à structurer les contacts avec la direction.
Malgré les difficultés, de belles ava ncées ont été réalisées! Quelle est votre principale victoire?
Il a fallu revoir le règlement de travail, qui n’avait jamais intégré la législation sur la prévention des risques psychosociaux et qui ne prévoyait pas de modalités d’enregistrement du temps de travail. De plus, il était méconnu de beaucoup. En l’absence de conseil d’entreprise institué, la direction a modifié le règlement de travail existant. Comme prévu par la législation, les travailleuses, via leurs déléguées, ont introduit leurs remarques sur le projet et, comme le prévoit la procédure, l’inspection des lois sociales est venue nous aider à finaliser le document. Les deux inspecteurs ont fait un très bon boulot de conciliation! Nous nous sommes mis d’accord avec la direction pour un pointage via SMS, WhatsApp ou courriel étant donné que les aide-ménagères ne passent pas à l’agence avant et après leur travail. Nous avons négocié une intervention fixe de 10 euros net par mois, reprise dans la fiche de salaire, pour l’usage du GSM.
Quelles sont vos perspectives pour les quatre ans à venir?
Avant tout, il est essentiel de pouvoir garantir une représentation syndicale dans l’entreprise grâce à la désignation de déléguées. Ensuite, nous allons tenter de convaincre des collègues de se porter candidates aux élections sociales afin de pouvoir installer des organes de concertation. Ce ne sera pas facile: il a fallu deux ans pour convaincre deux aide-ménagères de rejoindre le syndicat comme déléguées! Notre objectif n’est certainement pas de contrer systématiquement la direction, ni de demander la lune. Nous voulons simplement des conditions de travail décentes, des relations de travail basées sur le respect et l’entraide et plus de justice.