L’ACCORD DE GOUVERNEMENT SOUS LA LOUPE /
Travailler, se taire et subir n’est pas envisageable!
Ann Vermorgen, présidente de la CSC / 13 février 2025 / temps de lecture: 2,5 minutes
La première couche de sable du désert est un peu retombée pour laisser place à un bourbier épais et sale. Il n’y a pas d’autre conclusion possible: les intentions du nouveau gouvernement sont de plus en plus claires.
Les citoyens ordinaires devront travailler encore plus dur et plus longtemps. Je ne suis pas seulement inquiète pour ceux qui sont déjà actifs dans le monde du travail, mais aussi pour l’avenir de nos enfants, qui devront tenter de construire leur vie dans ce contexte. Les réformes des pensions et les contrats précaires les toucheront également de plein fouet. En attendant, il n’y a pas la moindre marge pour des augmentations salariales brutes. Une augmentation des salaires nette pourrait intervenir en 2029, mais le gouvernement ne dispose d’aucun moyen à cet effet. Il a même rogné sur les augmentations promises pour les pensions les plus basses. Il répète exactement ce qu’a fait le gouvernement Michel avec le chèque en blanc du tax shift. Les citoyens ordinaires en paient encore le prix aujourd’hui, et les prochaines mesures non financées sont déjà sur la table.
Il n’y a des moyens que pour les allègements de charges patronales, soit pas moins de deux milliards (on nous dit pourtant qu’il n’y a pas d’argent!). Ces fonds ne proviendront pas non plus de la taxe sur les plus-values. La contribution des plus nantis, qui aurait pu offrir un semblant de justice, n’est en réalité qu’un projet flou griffonné sur un carton de bière.
Il nous reste deux options. Renoncer en nous disant «De toute façon, ces grands hommes à Bruxelles feront ce qu’ils veulent». Mais travailler, nous taire et subir, ce n’est pas le choix de la CSC! C’est pourquoi nous avons lancé une campagne d’information et de sensibilisation. Nous devons maintenant nous assurer que les citoyens ont conscience de ce qui les attend réellement. Ce qui se profile est bien moins positif que ce que certains responsables politiques ont présenté lors de leur congrès. À en juger par les messages et mails que je reçois - et ils sont nombreux - la population est inquiète et en colère face à la propagande gouvernementale qui se dégonfle telle une baudruche.
Nous devons canaliser cette colère et créer un rapport de force, au travers de diverses actions, grandes ou petites. Le gouvernement doit comprendre qu’il ne peut pas s’en tirer à si bon compte. Car s’il y a une chose que les responsables politiques et leurs alliés du monde des affaires redoutent, c’est que leurs électeurs et travailleurs commencent à se révolter. Nous devons faire remonter cette boue dans les luxueux bureaux du Parlement et des conseils d’administration.
Nous avons lancé notre mouvement le 13 décembre 2024. Une grande manifestation a suivi le 13 janvier 2025, contraignant les responsables politiques à déclarer qu’ils devaient procéder à des ajustements.
La manifestation du 13 février a été encore plus importante et une grève générale est prévue le lundi 31 mars. Ce mouvement ne s’arrêtera pas là. Nous devrons tenir bon dans les mois, voire les années à venir, avec ou sans préavis, car l’imprévisibilité génère de la nervosité. Nous ne nous laisserons pas diviser, contrairement à ce que le monde politique et certains médias tentent frénétiquement de faire aujourd’hui. C’est une ruse vieille comme le monde: diviser les citoyens pour mieux les exploiter. Nous ne tomberons pas dans ce piège! Les travailleurs n’ont jamais tiré profit de divisions internes. Seule l’unité nous fait progresser. Dans la division, nous sommes tous perdants.
Tant que le gouvernement et ses alliés du patronat ne voudront pas nous entendre, ils devront nous supporter. Jusqu’à ce qu’ils acceptent enfin d’écouter la population. À ce moment-là, nous pourrons nous asseoir et négocier des réformes justes et équilibrées, afin de corriger ce qui est aujourd’hui bancal. Il est regrettable que nous n’ayons pas d’autre option, que les citoyens soient contraints de se mettre en colère. On pourrait attendre mieux de la part des représentants du peuple, mais si c’est la seule solution, alors qu’il en soit ainsi.