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EN DÉBAT /

Un financement défaillant met en péril la sécurité sociale

TEXTE Bram Van Vaerenbergh / PHOTO Shutterstock / 22 mai 2025 / temps de lecture: 4 minutes

La sécurité sociale subit une pression croissante. Ce n’est pas nouveau.
Il y a longtemps que les cotisations sociales des travailleurs ne suffisent plus à financer le système.
La dotation d’équilibre - qui sert à couvrir les déficits «temporaires» - pourrait atteindre 14 milliards d’euros entre 2025 et 2029. Ses détracteurs la qualifient de dépense excessive, alors que cette situation est en réalité la conséquence logique de choix politiques qui privent la sécurité sociale de recettes. Qu’en est-il dès lors du financement de la sécurité sociale? Comment assurer un financement pérenne?

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Maarten Gerard,
responsable du service d’études de la CSC

«Déni face à la baisse des recettes»

«La dotation d’équilibre de la sécurité sociale ne cesse d’augmenter depuis plusieurs années et cette tendance devrait se poursuivre au cours de la période à venir. Par facilité, on pointe du doigt la hausse des dépenses, sans jamais s’interroger sur la baisse des recettes. Or, deux facteurs expliquent l’augmentation de la dotation d’équilibre: le vieillissement de la population qui accroît les dépenses et la diminution des recettes», commente Maarten Gerard.

Ce second volet - la baisse des recettes - est systématiquement ignoré, alors qu’il constitue pourtant l’une des principales causes de l’augmentation de la dotation d’équilibre ces dernières années. Il y a principalement trois facteurs qui expliquent cette diminution des recettes, certains très visibles, d’autres plus insidieux. Il y a d’abord la réduction d’impôt, insuffisamment financée, mise en place sous le gouvernement Michel en 2015. Ce «tax cut» s’est traduit par une baisse générale des cotisations sociales. Il y a ensuite les exonérations spécifiques de cotisations sociales, qu’elles soient directes (sous la forme de réductions ciblées) ou indirectes via des statuts particuliers comme les flexi-jobs, les jobs étudiants, le travail de plateformes, etc. Certains de ces statuts ouvrent même des droits… sans générer de financement en retour. Enfin, il y a les innombrables avantages salariaux accordés dans le cadre des plans cafétéria, qui échappent en grande partie aux cotisations sociales. Au total, ces mécanismes représentent un manque à gagner équivalent à celui de la dotation d’équilibre.»

«D’autre part, il y a l’évolution de notre société, marquée par le vieillissement de la population et l’on confond souvent le coût des pensions et celui des soins de santé. Compte tenu du vieillissement de la population, ces deux dépenses augmentent. Conformément aux positions défendues par le congrès de la CSC, il serait donc logique de financer entièrement les soins de santé à partir des moyens généraux, au travers d’une cotisation générale de santé, afin de compenser la croissance des dépenses, sans devoir augmenter les cotisations des travailleurs. Pour faire face au défi des pensions, il faut en outre que le capital contribue davantage, au vu des évolutions démographiques et de l’accumulation des richesses au cours des dernières décennies.»

«Combiner ces des deux pistes permettrait de faire fondre la dotation d’équilibre et de rééquilibrer la sécurité sociale, tout en renforçant la protection sociale sur le marché du travail », conclut Maarten Gerard.

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Olivier Malay, 
économiste au service d’études de la centrale CSC Alimentation et Services

«Le gouvernement allume lui-même l’incendie qu’il prétend vouloir éteindre!»

Dans le cadre d’une étude approfondie, la CSC Alimentation et Services, la CNE et ACV Puls ont examiné l’impact de la réduction des cotisations sociales pour le travail étudiant et les flexi-jobs. «Rien qu’en 2024, ces contrats ont creusé un déficit de 678 millions d’euros dans la sécurité sociale. À ce rythme, le trou budgétaire atteindra 1,5 milliard d’euros par an d’ici 2029», alerte Olivier Malay.

Le déficit annuel de 1,5 milliard d’euros vers lequel nous nous dirigeons d’ici 2029 représente environ la moitié des recettes attendues de la réforme des pensions et des efforts imposés aux malades de longue durée, déclare Olivier Malay, qui évoque l’impact de la réduction des cotisations sociales pour le travail étudiant et les flexi-jobs. L’une des pierres angulaires de la politique du gouvernement Arizona est la poursuite de la flexibilisation du marché du travail, en portant à 650 heures par an le nombre d’heures autorisées pour le travail étudiant et en généralisant les flexi-jobs à tous les secteurs. Cette flexibilisation coûtera 1,5 milliard d’euros par an à la sécurité sociale d’ici 2029. Dans les deux systèmes, les cotisations sociales sont nettement moins élevées que pour les contrats classiques. Dans le cas du travail étudiant, les cotisations s’élèvent à 2,71% pour le travailleur et à 5,2% pour l’employeur, contre 13,07% et 24,92% respectivement dans le cadre de contrats réguliers. Pour les flexi-jobs, aucune cotisation personnelle n’est prélevée, mais l’employeur s’acquitte d’une cotisation portée à 28%.

En généralisant le travail étudiant et les flexi-jobs et en allégeant encore les cotisations patronales, le gouvernement creuse délibérément un trou dans le budget de la sécurité sociale qui correspond aux recettes attendues de la réforme des pensions.»

Le gouvernement allume lui-même l’incendie qu’il prétend vouloir éteindre et réduit la qualité de vie des travailleurs. Ceux-ci doivent travailler plus longtemps et de manière plus flexible. Finalement, ce sont les futurs pensionnés qui compenseront la baisse des cotisations sociales des employeurs.»

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