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CLIMAT /

Cop 28, flop 28?

TEXTE François Sana | PHOTO Photonews | 17 JANVIER 2024 | TEMPS DE LECTURE: 4 MINUTES

/Marche pour le climat, Bruxelles, 3.12.2023

Durant un peu plus de deux semaines, la 28ème Conférence des parties sur le climat (Cop 28) s’est tenue à Dubaï, du 30 novembre au 13 décembre dernier. Que retenir de cet événement?

Les deux cents pays signataires du texte final (les «parties») se sont solennellement engagés à contribuer conjointement à «une transition vers l’abandon des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques, de manière juste, ordonnée et équitable, afin d’accélérer l’action au cours de cette décennie critique et de parvenir à des émissions nettes nulles d’ici à 2050, conformément à la science». L’objectif principal est de maintenir la limite de haussement de température de 1,5 °C à portée de main. Cet engagement a été salué par le mouvement syndical international (la Confédération syndicale internationale-CSI) et qualifié d’historique par le sultan Ahmed Al Jaber, président de cette Cop.

Une Cop historique?

Mais en quoi pourrait-on vraiment qualifier cette Cop d’historique? En ceci: c’est la première fois que les pays parviennent à nommer collectivement les responsables du réchauffement climatique: les combustibles fossiles. Cela a été très difficile à obtenir. Or, les combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon) sont responsables de plus de 75% de la crise climatique actuelle, le reste étant causé en grande partie par l’élevage intensif. Mais cela, nous le savons scientifiquement depuis des décennies.

Deux faits: l’année 2023 est probablement la plus chaude jamais enregistrée et les émissions de gaz à effet de serre ont également atteint un nouveau record à la hausse cette année. Rappelons aussi que, depuis la première Cop sur le climat à Berlin en 1995, seules deux années ont connu une diminution des émissions de gaz à effet de serre à l’échelle mondiale, la seule pertinente pour le climat: 2009 (crise financière mondiale accompagnée d’une baisse du PIB mondial) et 2020 (crise sanitaire mondiale accompagnée également d’une baisse du PIB). La lenteur des négociations climatiques internationales face à la vitesse du réchauffement climatique fait froid dans le dos.

Un premier bilan mondial des efforts

Pour la première fois, conformément à l’Accord de Paris, un bilan mondial («global stocktake» ou «GST») des efforts mis en œuvre et planifiés pour réduire les émissions a été réalisé. Il indique, sans surprise, que les parties ne sont pas sur la bonne voie pour atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Le bilan mondial invite les parties à prendre des mesures pour tripler, à l’échelle mondiale, les capacités en matière d’énergies renouvelables et doubler l’efficacité énergétique d’ici à 2030. La liste des recommandations comprend également l’accélération des efforts en vue de la réduction progressive de la production d’électricité à base de charbon, l’élimination des subventions inefficaces aux combustibles fossiles et d’autres mesures qui favorisent la transition vers l’abandon des combustibles fossiles dans les systèmes énergétiques, de manière juste, ordonnée et équitable.

À court terme, les parties sont encouragées à présenter des objectifs ambitieux de réduction des émissions à l’échelle de l’économie, couvrant tous les gaz à effet de serre, tous les secteurs et toutes les catégories et alignés sur la limite de 1,5°C, dans leur prochaine série de plans d’action sur le climat, connus sous le nom de «contributions déterminées au niveau national» (ou «NDC»), d’ici à 2025. En Europe (et donc en Belgique), nous parlons de PNEC (plan national énergie-climat) et non de NDC. En fait, les PNEC des différents pays européens constituent leurs contributions déterminées au niveau national (NDC). La future Commission européenne devra établir un nouvel objectif à l’horizon 2040 qui conditionnera le plan belge.

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C’est la première fois que les pays parviennent à nommer collectivement et explicitement les responsables du réchauffement climatique.

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Quelle place pour les syndicats?

D’un point de vue syndical, nous pouvons, à l’instar de la CSI, nous féliciter que le programme de travail pour une transition juste, adopté lors de cette Cop, fasse référence aux droits du travail et à la protection sociale, et reconnaisse les actions que les syndicats du monde entier mènent sans relâche pour faire face au changement climatique. La référence à la protection sociale dans l’accord sur l’adaptation est également un point positif. Néanmoins, l’absence de référence aux travailleurs et à leurs syndicats dans le bilan mondial est une omission de taille qui révèle l’ampleur du travail encore à accomplir pour nous inclure dans les années à venir. Bien des pays s’opposent à toute référence aux syndicats dans le bilan global et d’autres textes. Nous pouvons également déplorer le manque de volonté générale de faire intégralement participer les syndicats à la transition hors des énergies fossiles et à d’autres aspects essentiels de l’action climatique. De très nombreux négociateurs sur le climat ne comprennent toujours pas la nécessité de la justice sociale pour assurer le soutien sociétal nécessaire afin de relever le défi gigantesque de la limitation du changement climatique.

Un fonds pour les pertes et les préjudices

La création du Fonds pour les pertes et les préjudices constitue une étape positive, franchie lors de cette Cop. Des efforts doivent être consentis pour veiller à ce qu’il soit doté de moyens financiers en suffisance et puisse soutenir les pays moins riches afin qu’ils investissent dans des projets d’atténuation qui réduiront les effets du réchauffement climatique et répareront les dommages déjà causés aux vies, aux moyens de subsistance, aux infrastructures et à la biosphère.

Europe, leader climatique?

Dans ces négociations climatiques, l’Europe prétend vouloir rester leader en matière d’action climatique. Si tel était bien le cas, elle pourrait entre autres accélérer la sortie des énergies fossiles sur son territoire via notamment des plans concrets de transition juste avec garanties d’emplois pour véritablement «ne laisser personne de côté»; elle pourrait éradiquer la précarité énergétique (qui concerne plus de 50 millions de personnes en Europe); sortir du traité sur la Charte de l’énergie (ou «TCE») et annuler la dette publique des pays pauvres qu’elle détient afin qu’ils puissent dégager des moyens financiers pour leurs actions climatiques et leur politiques sociales.

Et la Belgique?

Quant à la Belgique, un des prochains enjeux de taille est la remise fin juin 2024 de son PNEC. Celui-ci devra montrer comment notre pays va se mettre sur la trajectoire d’un réchauffement limité à 1,5 degré au moyen de la transition juste.

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