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« La majorité des sous-traitants de PostNL n’a pas à payer pour ces quelques pommes pourries ! »
Texte - A-C M-L // Illustration - Rutger Van Parys // PRINTEMPS 2022 // TEMPS DE LECTURE: 2 MINUTES
Les descentes répétées de l’inspection du travail, entre autres, dans les dépôts de PostNL et les fermetures temporaires qui les ont suivies en raison d’infractions telles que le travail non déclaré, l’emploi de personnes sans titre de séjour et même le travail des enfants chez divers sous-traitants, ont attiré considérablement l’attention des médias vers l’ensemble du secteur de la distribution de colis au cours des derniers mois.
Cependant, Ufuk Demirsoy, propriétaire de l’une des 220 entreprises avec lesquelles PostNL collabore, s’est inquiété que « des personnes sans aucune connaissance de l’industrie et sans aucune affinité avec le secteur » aient critiqué dans les médias l’ensemble du système de sous-traitance. « La grande majorité des sous-traitants est en règle et n’a pas à payer pour ces quelques pommes pourries », déclare-t-il.
« Pendant 10 ans, j’ai travaillé dur pour développer mon entreprise dans le respect de toutes les prescrits légaux », commence Ufuk Demirsoy. « J’offre également un salaire correct à mes chauffeurs et j’essaie toujours d’établir des grilles horaires décentes. Et je suis certain que je ne suis pas le seul. La grande majorité du secteur est intègre. Ces quelques pommes pourries éclipsent nos énormes efforts pour contenter tous les travailleurs et être en ordre au niveau de la police, de l’inspection du travail et des douanes. En attendant, les sociétés de distribution de colis peinent à garder la tête hors de l’eau, voire à générer des bénéfices. Après tout, l’entrepreneuriat consiste à gagner de l’argent ».
« Au cours des dix années durant lesquelles j’ai été actif dans le secteur, la tendance a toujours été la même : le nombre de colis à livrer augmente et le montant reçu par colis livré diminue. Il faut donc livrer de plus en plus de colis pour gagner autant ou – au mieux – un peu plus. Avec les tarifs actuels, un sous-traitant ne ‘gagne’ en réalité que juste assez pour couvrir ses frais. Dans le cas contraire, il s’agit d’une de ces pommes pourries se livrant à des pratiques illégales pour pouvoir faire du profit envers et contre tout ».« Les entreprises de transport aiment les slogans sur la ‘coopération durable’, mais dans la pratique, celle-ci est à peine perceptible. Non seulement dans le secteur de la livraison de colis mais aussi dans le petit transport. Je me souviens d’une livraison urgente que j’ai autrefois sous-traitée à l’une des plus grandes sociétés de transport du pays. Alors que le tarif minimum habituel pour de tels trajets était de 0,60 euros par kilomètre, je n’ai été autorisé à facturer que 0,42 euros par kilomètre. À prendre ou à laisser. Je n’ai plus jamais fait appel à cette entreprise car à ce tarif, il est impossible de gagner de l’argent. Seuls les chauffeur d’Europe de l’Est, que vous voyez circuler en masse, peuvent y arriver ».
Coûts réels
« L’essentiel, dans ce débat, est de savoir s’il peut être considéré comme normal que le travail permanent puisse être sous-traité à un tiers », réagit Christof Valcke. « La réponse est claire et nette : non. Que ce travail soit effectué par des collaborateurs disposant d’un contrat à durée indéterminée doit rester la norme. Cela offre la meilleure garantie d’un salaire correct à hauteur du service rendu et permet également le contrôle nécessaire. »
« Non pas que nous, en tant que syndicat, soyons contre la flexibilité dans les secteurs qui en ont besoin, comme le secteur de distribution de colis. Les nouvelles règles proposées par le ministre De Sutter laissent suffisamment de marge aux sous-traitants indépendants pour les aider à absorber les pics d’activité. Mais il ne peut être possible pour une entreprise d’externaliser complètement ses activités de transport et ainsi échapper à tout contrôle ». //
Les prix appliqués dans le secteur de la distribution des colis ne reflètent pas le coût réel de l’activité et cela pose la question des conditions de travail du personnel des secteurs route et logistique. Ce sont les grands groupes qui tirent les prix vers les bas au détriment de l’ensemble des acteurs du secteur. En tant qu’organisation syndicale, la CSC-Transcom combattra ces pratiques jusqu’à ce que tous les travailleurs et les entreprises respectueuses des accords sectoriels et de la législation puissent travailler dans de bonnes conditions, dans l’intérêt de chacun.
Ufuk Demirsoy (ohoto, source: De Standaard, Boumediene Belbachir) est coursier indépendant depuis 2012. Au début, il travaillait seul pour livrer les paquets. Huit chauffeurs travaillent actuellement pour lui. PostNL est son client le plus important.
Christof Valcke est secrétaire à la CSC-Transcom dans le secteur du transport routier et de la logistique.